Une artiste pas comme les autres ...

UNE ARTISTE PAS COMME LES AUTRES …


Diplômée de l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux Arts de Paris, Filomena Salley a étudié, à la manière d'un médecin légiste, les différents courants, s'est imprégnée de l'acquis virtuose des grands maîtres. Mais elle comprend que, si elle veut donner une âme à son travail, elle doit - tel l'élève qui, après une longue retraite de méditation silencieuse, a besoin de prendre la clé des champs - laisser libre cours à ce besoin viscéral d'indépendance, quelque peu désinvolte, directe. Elle applique les règles de l'art avec une affirmation de jouissance, de liberté et d’espoir.

Filomena travaille le terrain sensible de la pensée érotique dans un langage poétique... un monde où opulence et plaisir côtoient dépouillement et pureté.

Sa peinture est fort éloignée du paysage corporel contemporain et de l’environnement d'aujourd'hui, souvent bien grouillant et surchargé. Les sujets traités ne font presque aucune référence à des évènements extérieurs. En rentrant dans son décor, ces sujets aux divines silhouettes, participent à la création d'un univers où seule la beauté domine

Ses oeuvres n’en gardent que les atouts, tout en conférant à leur détenteur la satisfaction du plaisir esthétique, celui de cueillir sur ces
corps, la beauté, la poésie,
le chant de la chair et d’en détecter les signes et le langage.

Les codes de l’ère moderne n’ont guère profité à l'image de la féminité et les artistes hommes (et quelques femmes aussi) se sont surtout acharnés à détruire peu à peu les canons qui servaient de référence à la beauté d'un corps de femme. Corps devenus schémas, figures géométriques, ébauches tantôt aplaties, tantôt ballons.

Au nom de l'art, la femme se plie comme un fil de fer ou se gonfle comme une baudruche. La parité a donné à l'homme le moyen de féconder : une femme qui, à elle toute seule, est le monstre et la bête. Cependant l'Individu, comme l'Amour, restent attachés au culte de la sensualité. Or, celle-ci reste intrinsèquement liée à la femme.

Pour parler de son travail, l'artiste, elle-même, le dit : elle ne prétend pas apporter de nouveautés techniques dans l'art mais elle ne se soumet pas, non plus, aux modes du moment ou à la mouvance des tendances intellectuelles. Son oeuvre, instinctive, tel un classique intemporel, est une succession de personnages qui, comme au théâtre, donnent vie à une mythologie qui lui est personnelle et intime. Derrière l’appât rétinien de ces œuvres s’ouvre un jeu d’interprétations.

Nous ne parlons le mieux que de ce que nous connaissons le mieux ! Filomena se connaît et se reconnaît dans la femme. Mais elle se reconnaît - et nous reconnaît – aussi par, et dans, le regard amoureux de l'homme.


Belles, sensuelles, parfois érotiques, mais jamais ordinaires, elles s'expriment avec une élégante effronterie, une noble dignité. Filomena, au travers de son oeuvre est autant peintre qu'écrivain, metteur en scène. La toile est une scène où elle fait évoluer son histoire. Chaque lever de rideau apporte sa surprise. Des histoires parfois en un acte, parfois en plusieurs.

Figures graciles et fragiles mais ne se pâmant pas à tout moment, altières jamais dédaigneuses, lascives sans excès, dominatrices mais avec retenue. Quand le spectateur pense avoir, là, toute l'intrigue, un ange passe et nous le suivons, pour notre plus grand bonheur, dans les coulisses où maquettes, décors et accessoires sont un ravissement de minutie, qualité et finesse.

Elles peuvent aussi évoluer à la manière d'un matador, conquérant, dont on devine que sa muleta servira à couvrir pudiquement une faëna consentie. Ou, diaphanes se louvoyant dans un drapé couleur d'embruns crépusculaires.

Une toile, on doit avoir envie de la toucher, de la caresser. Notre regard effleure le duveté d'une pêche juteuse dont nous savourons à l'avance le plaisir de sa chair.
Ebènes délicatement polies, albâtres purs lovés au creux d'une vague douce, ivoires défensives scrutant l'horizon. Et toutes rivalisent de l'art du poète universel.

Longtemps l'artiste a eu du mal à se séparer de son oeuvre. En chacune il y avait elle et toutes les femmes qu'elle estime et respecte. Les laisser partir était comme une trahison. Le désir du spectateur a fini par avoir raison de son coeur. Son oeuvre non exposée devenait le miroir de la femme qui ne connaît plus l'amour dans le regard de l'autre. Et, à l'image de notre société, chacune de ses toiles nous ferait devenir infidèles.... qu'on se le dise, de tous temps l'on a butiné ici et là mais le respect était une valeur sûre ; on entretenait autrement les liens tissés. Faisons de même avec l'oeuvre de Filomena ... seul harem où la discorde devient synonyme d'harmonie ! Tout dialogue véritablement amoureux y gagne !



« Béla Sioulé »